Qu'est-ce qui va changer pour les chômeurs frontaliers en 2024 ?
Depuis le 1er février 2023, une nouvelle réforme du chômage est en vigueur, et elle concerne autant les Français que les frontaliers suisses au chômage. En effet, travailler en Suisse et vivre en France possède de nombreux avantages, mais qu’en est-il en cas de perte d’emploi suisse et qu’est-ce qui va changer pour les chômeurs en 2024 ? Le Guide fait le point sur les démarches à effectuer, mais surtout sur l’impact de cette nouvelle réforme pour le frontalier au chômage.
Quelle est la nouvelle réforme du chômage ?
De quoi est composée la nouvelle réforme ?
La nouvelle réforme du chômage implique principalement le recalcul de la durée d’indemnisation pour l’ARE, l’Allocation d’aide au Retour à l’Emploi. En effet, la durée d’indemnisation ne pourra pas être inférieure à 6 mois, soit 182 jours.
Par ailleurs, la durée d’indemnisation peut s’étendre si :
- vous arrivez en fin de droit alors que vous êtes en cours de formation qualifiante, et si celle-ci est inscrite dans votre PPAE (Projet Personnalisé d’Accès à l’Emploi) et dure au moins 6 mois ;
- le Ministère du travail dresse un arrêté en cas de dégradation de l’emploi et du marché du travail.
De quelle manière sont prolongés vos droits ?
Dans les deux cas mentionnés ci-dessus, vous pouvez prétendre à la prolongation de vos droits d’indemnisation. Ainsi :
- le montant versé lors de la prolongation est le même que le dernier paiement d’allocation versé ;
- il est versé automatiquement à la fin de vos droits en cours ;
- le nombre de jours de prolongation est basé sur votre durée initiale d’indemnisation ;
- vous êtes informé(e) de la durée de votre prolongation d’indemnités avant la fin de vos droits.
Qu’est-ce qui ne change pas ?
En dehors de ces bouleversements, la nouvelle réforme du chômage conserve certaines règles d’indemnisation déjà présentes avant le 1er février 2023.
- La durée d’affiliation
Il s’agit de la durée minimale de travail à effectuer pour pouvoir prétendre à l’ARE. Celle-ci reste fixée à 6 mois, c’est-à-dire 130 jours ou 910 heures.
- Les conditions pour pouvoir ouvrir les droits à l’ARE
- être inscrit comme demandeur d'emploi ;
- être involontairement privé d’emploi ;
- ne pas avoir atteint l’âge légal de départ à la retraite (entre 62 et 67 ans) ;
- être physiquement apte à travailler
- poursuivre sa recherche d’emploi de manière active ;
- vivre sur un territoire couvert par l’Assurance chômage, frontalier inclus donc.
- Les règles de cumul
En cas d’activité en cours d’indemnisation chômage, les règles de cumul entre allocation et rémunération restent les mêmes.
- Les délais et reliquats
Il n’y a pas de changement concernant le début du versement de l’allocation qui peut être décalé.
- La dégressivité
Certains salariés de moins de 57 ans peuvent prétendre à la dégressivité si leur ancien salaire dépasse un certain montant.
- Le type de versement
Le versement de vos indemnités se fait toujours de manière mensuelle.
Quelles sont les nouvelles règles de calcul de l'allocation chômage ?
Montant de l’ARE
En 2023, le montant minimal de l’ARE était de 31,59 euros. Pour les demandeurs d’emploi qui suivaient une formation, il était fixé à 22,61 euros.
En 2024, le montant moyen de l’ARE est de 34 euros brut, soit environ 1020 euros par mois (sur un mois de 30 jours indemnisés).
Attention : un délai de carence de 7 jours est appliqué au premier versement de votre indemnisation ARE, s’il s’agit de votre toute première demande. Ce délai est supprimé s’il a déjà été appliqué dans les 12 mois précédents.
Calcul de l’ARE en 2024
Que vous soyez frontalier ou non, l’indemnité chômage est toujours calculée à partir de vos derniers salaires perçus (en brut) sur une période donnée, la plupart du temps sur 24 ou 36 mois.
Une moyenne de vos salaires est réalisée afin de permettre le calcul de votre indemnisation (appelée SJR - Salaire journalier de Référence) et sa durée, le tout selon une part fixe et une part variable.
- Part fixe : 12,95 € + 40,4 % du SJR ;
- Part variable : 57% du SJR, calculé selon
- le salaire de référence brut ÷ nombre de jours travaillés x 1,4
Notez que le montant défini ne peut pas être supérieur à 75 % ni inférieur à 57 % du SJR. La somme estimée pourra donc être diminuée ou modifiée pour pouvoir rentrer dans ces pourcentages obligatoires.
Durée des droits à l’ARE
La durée d’ouverture de vos droits à l’ARE en tant que frontalier dépend de votre durée d’affiliation lors des 24 ou 28 derniers mois, soit au maximum :
Âge du demandeur d’emploi | Durée d’affiliation |
---|---|
Moins de 53 ans | 18 mois, soit 548 jours calendaires |
53 ou 54 ans | 22,5 mois, soit 685 jours calendaires |
55 ans ou plus | 27 mois, soit 822 jours calendaires |
Quel impact pour le frontalier ?
Le point sur la perte d’emploi en Suisse
Avant toute chose, il semble important de faire le point sur une différence essentielle entre la France et la Suisse : le licenciement. En effet, le droit du travail suisse autorise le licenciement sans motif. Bien que les employeurs n’en abusent pas, sachez qu’un contrat peut être résilié (même à l’oral) avec un préavis très court :
- de manière immédiate en cas de faute grave ;
- 7 jours en période d’essai ;
- 1 mois pendant la 1ère année de contrat ;
- 2 mois jusqu’à 9 ans d’ancienneté ;
- 3 mois au-delà de 9 ans d’ancienneté.
Le pays d’indemnisation
Si vous avez perdu votre emploi en Suisse, vous devez demander l’indemnité chômage en France (France Travail depuis le 1er janvier 2024, anciennement Pôle Emploi). Cependant, cela ne s’applique que si vous êtes au chômage complet.
Situation | Conditions | Pays d’indemnisation |
---|---|---|
Vous êtes au chômage partiel | Vous ne travaillez plus en raison d’une interruption d’activité de votre entreprise de type chômage technique, intempéries, etc. | Vous bénéficiez des indemnisations suisses |
Vous êtes au chômage complet | Vous êtes dans le cas d’une rupture définitive de votre contrat de travail | Vous êtes indemnisé par l'assurance chômage française |
Les démarches du frontalier au chômage
Si vous êtes au chômage complet, vous pouvez donc prétendre aux indemnités chômage en France. Pour cela, certaines démarches sont à effectuer.
1. Vous inscrire auprès de France Travail dès le 1er jour chômé
Lors de votre inscription sur la plateforme France Travail, vous devrez demander à votre/vos dernier(s) employeur(s) suisse(s) une attestation employeur internationale.
Une fois ce document établi, il vous faudra contacter la caisse de chômage suisse pour obtenir un document appelé portable PD U1.
Ces documents doivent ensuite être transmis à France Travail.
2. Faire votre demande d’indemnisation
Vous pouvez bénéficier de l’indemnisation chômage en tant qu’ancien travailleur frontalier si vous cochez certaines conditions :
- vous avez été licencié (pour n’importe quel motif, faute comprise) ;
- vous avez démissionné pour un motif reconnu légitime par le juge (harcèlement moral, sexuel, violences par l’employeur, non-paiement de votre salaire) ou pour suivre votre conjoint(e) muté(e) ;
- vous êtes arrivé au terme de votre CDD ou contrat d’apprentissage ;
Par ailleurs, notez que la rupture d’un contrat en Suisse découlant d’un accord commun n’ouvre pas droit aux allocations chômage en France. En effet, elle peut être assimilée à une forme de rupture conventionnelle selon le Code du travail français (article L.1237-11).
3. Mettre en place un PPAE
Comme indiqué plus haut, une fois votre inscription validée, vous devrez établir un PPAE, un Projet Personnalisé d’Accès à l’Emploi. Il vous permet de définir vos intentions professionnelles futures, le délai de votre retour à l’emploi, mais également le type d’accompagnement dont vous avez besoin. La validation de ce PPAE est obligatoire pour lancer et percevoir vos indemnités.
4. Répondre aux offres d’emploi
À travers ce PPAE, des offres d’emploi peuvent vous être adressées. Vous êtes en droit de les refuser, mais uniquement à deux reprises et pour motif valable. En cas de refus sans motif, vos allocations chômage seront suspendues pour une durée de 2 mois.
L’indemnisation du frontalier
Les salaires suisses étant bien plus élevés qu’en France, les travailleurs frontaliers sont donc en moyenne mieux indemnisés que les personnes ayant perdu leur travail en France (selon l’Unedic). Le montant d’une allocation chômage pour le frontalier s’élève à 57 % de la moyenne des 24 (ou 36) derniers mois de salaire suisse (en brut). Ce montant est bien entendu converti en euros selon le taux en vigueur au moment du calcul.
Depuis le 1er octobre 2021, l'allocation des frontaliers est dégressive dès le 8ème mois. Cette réforme concerne les salaires supérieurs à 4 545 € brut mensuels. La rémunération ARE des frontaliers au chômage sera réduite de 30 % avec un plancher fixé à 2 261 net €.
Quels sont les droits au chômage après 55 ans ?
Les conditions d’indemnisation du frontalier après 55 ans
En 2023, les personnes de plus de 55 ans bénéficiant du droit au chômage sont indemnisées sur 27 mois, contre 18 mois pour les chômeurs de moins de 55 ans. Cette mesure avait été prise pour compenser le fait que les plus de 55 ans étaient davantage confrontés au chômage en raison de l’hésitation des entreprises à employer des séniors.
On estime, selon France Travail, qu’un sénior de plus de 55 ans reste en moyenne 806 jours au chômage contre 370 jours pour les autres personnes de moins de 55 ans.
Une négociation en cours
Le 8 novembre 2023, Bruno Le Maire, ministre de l’Économie, propose la réduction de la durée de l'indemnisation des chômeurs de plus de 55 ans, la faisant ainsi passer à 18 mois. La raison : aligner la durée des indemnisations pour toutes les personnes au chômage et permettre d’atteindre le plein emploi.
Cette mesure pousserait ainsi les plus de 55 ans à retrouver un travail plus rapidement, et potentiellement permettre à la France de réduire son taux de chômage, actuellement à 7,4 %.
Cependant, les syndicats ont rappelé que les conditions d’indemnisation chômage des plus de 55 ans ont déjà été dégradées en février 2023, avec une période de droit réduite de 25 %. Cette durée a été ramenée de 36 mois à 27 mois pour les plus de 55 ans (et de 27 à 22,4 mois pour les chômeurs âgés entre 53 et 55 ans).
Un accord et la mise en place de mesures concrètes devraient voir le jour d’ici mars 2024, en corrélation avec la lettre de cadrage du gouvernement qui a pour objectif d’arriver à un taux d’emploi pour les séniors à hauteur de 65 % d’ici 2030, frontaliers inclus, contre 35 % seulement actuellement.
Le frontalier doit donc prendre en considération l’impact de cette nouvelle réforme sur son indemnisation chômage et sa durée. Mais cette nouvelle réglementation ne semble pas être la dernière : les plus de 55 ans sont également concernés par de nouvelles conditions d’indemnisation potentielles d’ici mars 2024. Le Guide reste à l’écoute pour faire le point pour vous et avec vous, en toutes circonstances.